Camus : le grand remplacement

J’ai lu le livre de Renaud Camus « le grand remplacement », dans sa 3ème édition de 2015 (la première édition datait de 2011).

J’avoue d’abord que je commence à écrire avec une petite arrière-pensée négative. Sur un plan pratique, j’ai un peu l’impression de m’être fait arnaquer économiquement.

En effet, la première partie de l’ouvrage est constituée par « le changement de peuple ». Or ce texte avait constitué un livre à part, que j’avais acheté ; j’aurais donc pu faire des économies en ne l’achetant pas, et en lisant ce texte directement dans « le grand remplacement ».

Je n’ai pas relu « le changement de peuple » ; et je n’en parlerai donc pas ici, l’ayant déjà évoqué précédemment1.

Venons-en donc au reste du livre.

Un grand défaut du livre est la répétition. En effet, c’est un recueil de discours. Les différents discours étant non seulement sur les mêmes thèmes, mais reprenant parfois les mêmes thèses, les mêmes exemples, on ne peut qu’être lassé par cette impression de déjà-lu permanent qui s’installe au fil de la lecture des discours successifs. Si l’on peut admettre que l’auteur se répète dans ses différents discours, un peu comme un candidat qui irait répéter la même chose de meeting en meeting, on aurait pu espérer l’élégance de ne pas imposer ces redondances aux lecteurs d’un livre.

Ceci dit, cet ouvrage fournit des éléments très intéressants.

On trouvera pour commencer la définition du grand remplacement énoncée par l’auteur, et c’est sans doute ce qu’on en attendait prioritairement, Renaud Camus étant systématiquement présenté comme l’inventeur de cette théorie ; notion de théorie qu’il conteste d’ailleurs, expliquant qu’il s’agit plus d’un constat : « Le Grand Remplacement, je l’ai ressenti pour la première fois à Lunel, dans l’Hérault, il y a au moins trois lustres de cela, et aussi dans les petits villages anciens, médiévaux, de la plaine côtière, en constatant un beau jour, stupéfait, que la population, en une génération, avait été entièrement changée, que ce n’était plus le même peuple aux fenêtres et sur les trottoirs, qu’un changement à vue était survenu, que sur les lieux même de ma culture et de ma civilisation je marchais dans une autre culture et une autre civilisation, dont je ne savais pas encore qu’elles étaient décorées du beau nom trompeur de multiculturalisme ».

L’ouvrage ne se limite pas au grand remplacement.

Ainsi l’auteur se prononce-t-il sans ambiguité contre la violence. Le fondement de son positionnement politique est d’ailleurs le refus de toute nuisance (la « nocence » dans son jargon).

Renaud Camus se positionne comme un adepte forcené du malthusianisme ; à ce titre, il ne souhaite donc pas pas lutter contre l’invasion migratoire en augmentant la natalité française.

Concernant les diplômes, Renaud Camus se distingue par une position originale ; alors que ces dernières décennies, les résultats du baccalauréat sont toujours l’occasion de se féliciter d’un taux de réussite croissant, ce qui est l’objectif même s’il faut pour celà baisser le niveau du bac, l’auteur se prononce à contrecourant pour un relèvement substantiel du niveau du bac avec une diminution du taux de réussite comme objectif.

Intéressante remarque aussi sur l’obsession du neuf et du moderne dans notre société, et surtout sur la société du jetable : « Nous sommes la première civilisation qui construit des maisons faites pour durer dix ans. Nous sommes la première civilisation qui s’émerveille qu’un pont2, un pont magnifique, un pont qui fait la fierté du régime, promette, à quelques lieues à peine du pont du Gard, d’être encore parfaitement utilisable dans quarante ans. Nous sommes la première civilisation qui explique le désastre d’un lycée, la violence qui y règne, l’impossibilité de le faire servir à la moindre transmission, par sa vétusté, car il a été construit, pensez, il y a trente ou quarante ans : qu’est-ce que vous voulez faire de sérieux dans des bâtiments pareils ? ».

A noter enfin, peut-être le texte le plus réussi : en fin de livre, Renaud Camus se livre à un pastiche de conte danois de 19 pages, qu’il intitule « Orop » (prononciation « europ »). Extrait : « Cette hébétude avait un nom, les poètes et savants de la cour impériale l’avaient baptisée vivre ensemble. Le vivre ensemble avait une idole, un petit dieu très exigeant et très cruel, qui se nommait Padamalgam. Chaque fois que des secousses de vérité ébranlaient à l’excès le vivre ensemble, et que le sang coulait à flot, des foules énormes se précipitaient dans les rues afin d’y promener l’idole propitiatoire, et le peuple entier criait d’une seule voix, sur son passage, Padamalgam !,Padamalgam ! -ce qui en fait voulait dire : « A bas la vérité ! Nous vivants, la vérité ne passera pas ! ». On savait que le petit dieu, en effet, était contre elle d’un effet souverain ».

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1- Voir chronique du 7 février 2017 : « Camus : le changement de peuple ».

2- Renaud Camus fait ici référence au viaduc de Millau.

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